Relisez attentivement

Les exceptions à l'absence d'effet rétroactif

Fondamental

En droit pénal, existe un principe (énoncé dans l'article L.112-1 du Code pénal) qui prévoit l'application rétroactive de la loi pénale lorsqu'elle est plus douce que la loi ancienne. Une loi pénale nouvelle est considérée comme étant plus douce lorsqu'elle abroge une incrimination, définit de manière plus étroite une infraction ou diminue les peines prévues. Cette application rétroactive de la loi pénale plus douce est désignée comme étant une rétroactivité in mitius (en latin, mitis signifie doux).

Complément

Font exception à la non-rétroactivité les lois dites interprétatives. Ce sont des lois qui viennent clarifier le sens des dispositions d'une loi antérieure. Elles s'appliquent donc dès l'entrée en vigueur de cette loi ancienne, ce qui lui donne un effet rétroactif. Selon la Cour de cassation, une loi ne peut être qualifiée d'interprétative que si elle se limite à reconnaître, sans rien innover, un droit préexistant qu'une définition imparfaite aurait pu soumettre à contestations (Cass. 3ème civ. 27 février 2002, n° 00-17902).

La portée de l'effet de la loi nouvelle pour l'avenir

Fondamental

Si la loi n'a pas, en principe, d'effet rétroactif, et ne dispose que pour l'avenir, il faut en déduire qu'elle s'applique dès son entrée en vigueur. Cependant, la portée de ce principe de l'application immédiate doit être précisée pour déterminer quelles sont les situations qui vont être soumises à la loi nouvelle, celle-ci ne pouvant pas avoir d'effet rétroactif. Dans ce but, il faut envisager les différentes situations possibles.

Exemple

1ère hypothèse : La loi nouvelle modifie les modalités et les conditions de création d'une situation juridique (un mariage ou un contrat).

Si cette situation juridique, par exemple un mariage ou la conclusion d'un contrat, a été créée avant la loi nouvelle et en respectant les conditions posées par la loi ancienne, elle ne peut pas être remise en cause en vertu de la loi nouvelle (principe de non rétroactivité). Le mariage ou le contrat reste valable. En revanche les mariages qui seront contractés ou les contrats qui seront conclus avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle devront respecter les conditions posées par celle-ci.

Le même raisonnement conduit à faire une application immédiate des lois de procédures (qui régissent la compétence juridictionnelle ou le déroulement du procès au moyen d'actes de procédure) aux procès en cours. Les actes de procédure (par exemple la saisine de la juridiction ou un recours) accomplis avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle restent valable et la situation juridique ainsi créée ne peut pas être remise en cause. En revanche, ceux accomplis après l'entrée en vigueur de la loi nouvelle seront soumis.

Exemple

2de hypothèse : la loi nouvelle modifie les effets d'une situation juridique créé antérieurement à son entrée en vigueur.

Si l'on applique les principes issus de l'article 2 du Code civil, seuls les effets futurs de cette situation juridique (ceux qui ne se sont pas encre produits au jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle) seront régis pas la loi nouvelle. Les effets passés ne sont pas remis en cause. Cependant ce principe ne vaut que pour les situations d'origine légale. Il en va différemment dans les situations d'origine contractuelle.

Situation d'origine légale : Si la loi nouvelle modifie les droits d'un conjoint en cas de décès de son époux, cette loi s'appliquera aux époux mariés avant son entrée en vigueur. Si la loi nouvelle modifie les conditions d'acquisition de la nationalité française, ces conditions s'appliqueront aux personnes nées avant son entré en vigueur.

Situation d'origine contractuelle. Les effets des situations juridiques contractuelles, à la différence des situations juridiques légales, restent soumis à la loi ancienne. Ce principe de la survie de la loi ancienne s''explique par la volonté de respecter la volonté des parties : elles se sont engagées en fonction des effets prévisibles donnés à leur contrat par la loi alors en vigueur au jour où elles ont contracté. Admettre l'application de la loi nouvelle aux effets d'un contrat antérieurement contracté, conduirait à ne pas respecter cette volonté. En outre, cette application pourrait remettre en cause l'équilibre contractuel voulu par les parties et établi en fonction de la loi ancienne. Cependant, même en l'absence de disposition législative écartant ce principe, la jurisprudence peut décider de l'application immédiate de la loi nouvelle aux situations contractuelles en cours.

Il en est ainsi lorsque la loi nouvelle répond à des considérations d'ordre public particulièrement impérieuses. A titre d'exemple, la Cour de cassation a admis l'application immédiate aux contrats en cours d'une loi prévoyant que des pénalités de retard sont dues de plein droit pour non-paiement des factures (Cass. Com., 3 mars 2008, n° 07-16527). Il en est de même lorsque la loi nouvelle concerne l'effet légal d'un type de contrat, à l'exemple du contrat de travail. Par exemple, la modification de la durée légale du travail s'appliquera aux contrats de travail en cours.

L'intervention du législateur

Fondamental

Le principe de non rétroactivité de la loi étant posé par la loi, le législateur peut, en principe, prévoir des solutions contraires dans la loi nouvelle. Ces dispositions sont qualifiées de dispositions transitoires

Exemple

Par exemple, le législateur peut indiquer expressément que la loi nouvelle est applicable aux contrats en cours.

Complément

Cependant, le droit à un procès équitable énoncé par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales s'oppose à ce que l'ingérence du législateur dans l'administration de la justice dans le but d'influer sur le dénouement judiciaire d'un litige. De même, le Conseil constitutionnel, sur le fondement de la sécurité juridique, peut être amené à contrôler le législateur lorsqu'il recourt à une loi rétroactive.